Nous comptons sur eux. Quand nous avons affaire à eux, nous sommes vulnérables, nous le sentons dans notre corps, et dans notre cœur.

Eux : les soignants, les aidants, les accompagnants – médecins, infirmiers, aides-soignants, psychologues… ceux qui sont là lorsque notre propre équilibre nous fait défaut.

Mais eux, comment vont-ils ?

Cela va sans dire, mais souvent c’est intéressant de le dire quand même : celui qui nous soigne ou celui qui nous aide se doit d’être en bonne santé, physique et psychique. On attend de lui qu’il soit debout, clair dans son esprit et ses actes, dans ses postures… cela fait partie de « compter sur lui ». Et surtout, nous attendons d’abord de lui qu’il ne soit ni malade, ni potentiellement contaminant, ni au bord de la rupture… Bref, qu’il soit en bon équilibre.

Dans cette période particulière, s’éclaire soudain d’une lumière crue ce point souvent dans l’ombre : comment va le soignant qui m’accueille ? Et comment lui-même, son service, son institution prennent-ils soin de lui, de son équilibre, de sa disponibilité, inhérents à sa posture professionnelle ?

Les risques du métier

Aujourd’hui, plus que jamais, la question de la santé psychologique des soignants et des aidants se pose. Avant même les difficultés liées à la contamination par la Covid 19, ils étaient déjà dans la rue, quelques semaines avant le début de l’épidémie, rappelant le manque de moyen et l’épuisement des troupes sur le terrain…

Le contact direct et récurrent avec la souffrance de l’autre, la tension toujours plus forte liée à l’économie de moyens, le travail en flux tendu, le rapport fonctionnel et comptabilisé au temps… rend le métier chargé de risques. Les « risques du métier », dit aussi psychosociaux, sont aujourd’hui bien documentés, et ainsi mieux connus. Les prendre en compte sur le terrain reste actuellement une gageure, un vaste chantier, encore à l’état d’ébauche, voir encore à l’état de projet non prioritaire…

L’urgence prend la part majeure, les soignants ont « le nez dans le guidon », et leurs corps, souvent, se met à les alerter. Quand le geste de soin, qu’il soit corporel et/ou relationnel, ne rejoint plus le sens, et l’accord intérieur, le soignant souffre, d’une forme de souffrance que l’on peut qualifier d’éthique. La souffrance éthique est cette tension, entre ce que je fais et mon désaccord intérieur. Elle peut porter atteinte, gravement, à l’équilibre et à la santé de celui qui soigne.

 

 

Prendre soin plutôt que prendre en charge

Au-delà des complexes questions institutionnelles et politiques, il est possible, pour le soignant comme pour l’aidant, de développer une attention particulière à soi et à l’autre dans la situation de soin. Une posture plus confortable, plus écologique pour lui-même, dans laquelle il pourrait prendre soin plutôt que prendre en charge, et intégrer sa propre personne, son équilibre, le respect de ses besoins, dans l’équation.

Lorsque le soin est rencontre, il est aussi rencontre avec soi pour celui qui soigne… et lorsque la rencontre soigne l’autre, le patient, elle peut aussi, souvent, être porteuse de sens et de développement pour celui qui prend soin. C’est d’ailleurs ce geste intérieur, dans la rencontre, qui est moteur de bien des vocations à ces métiers au service de l’humain. Serait-il possible d’être formé à ce geste intérieur, de trouver et habiter cette posture ajustée à soi et à l‘autre en situation de soin ou d’aide ?

Cette forme d’éthique qui permet non seulement de ne pas s’épuiser, mais de rendre à l’autre – le patient – sa juste part de responsabilité dans le processus de guérison…

 

Une posture intérieure

La réponse est oui. La Méthode Chamming’s, à l’origine pensée pour des « responsables », s’adresse aujourd’hui également aux soignants, et plus généralement aux acteurs médico-sociaux. Se situer de manière juste, en tenant compte de ses propres besoins, de ceux de l’autre et des nécessités et possibilités de la situation est l’une des clés fondamentales enseignée dans nos stages. Elle en est un fil conducteur, au fil des différents niveaux.

Il s’agit d’abord être à l’écoute de soi, en tant que personne, en tant qu’être de relation, en tant que son propre outil, engagé dans la rencontre… garder ouvert cet œil sur soi, permettant d’écouter ses propres signaux, matériel clinique essentiel, mais aussi ces lignes intérieures qui permettront de prendre en compte ses propres besoins… Un secouriste blessé ou mort ne secoure plus personne, apprend-t-on d’emblée dans les diplômes de secourisme. Ne pas s’épuiser, être connecté à ses ressources, savoir poser un cadre respectant nos propres limites… en bref, et en base, intégrer la personne du soignant, et le soin de lui-même, à la démarche de soin.

Ce n’est, à nos yeux, ni un luxe, ni une vue de l’esprit : c’est une possibilité et un devoir éthique, essentiels, permettant à la rencontre avec les patients d’avoir véritablement lieu, et aux services de soin de cultiver une pratique de soin vivante, en pleine santé. Alors vous, qui êtes soignant, aidant ou accompagnant, et qui sentez la nécessité de cette posture ajustée pour continuer à servir votre fonction : venez nous rencontrer !

 

Rédaction Hélène SPINDLER

Crédit photo Pixabay – Anja🤗#helpinghands #solidarity#stays healthy🙏